Tout amateur d’opéra italien garde en tête ce fameux air de la calomnie du Barbier de Séville où Don Basilio explique à Bartolo comment compromettre le soupirant de sa pupille : en laissant négligemment s’échapper une légère rumeur apparemment inoffensive qui, grossissant, va culminer dans une calomnie assassine.
Débutant en douceur, pianissimo, la musique de Rossini prend peu à peu de l’ampleur dans un lent crescendo pour finir par éclater dans un énorme tintamarre fortissimo. Pour Viktor Orbán, apparemment moins raffiné, nul besoin de ce stratagème : ses partitions débutent généralement d’emblée sur un fortissimo.
Dernier exemple en date, jeudi 6 septembre. S’adressant par vidéo-conférence aux députés de sa coalition réunis en congrès, Viktor Orbán se réfère à une liste de 15 exigences formulées par le FMI comme condition à l’obtention d’un crédit. La liste est publiée le matin même dans le quotidien Magyar Nemzet, acquis au gouvernement. Exigences que le Premier ministre qualifie de contraires à l’intérêt du pays, inacceptables et qu’il rejettera donc, en bon défenseur du peuple. Des exigences effectivement bien sévères, telles la diminution des pensions de retraite parallèlement à un recul de l’âge de la retraite, la diminution des allocations familiales, une augmentation de l’impôt sur le revenu et même – comble de cynisme – un financement du secteur bancaire !
Sauf qu’une telle liste n’a jamais existé, le FMI n’a jamais posé de telles exigences. La lettre à laquelle se référait Viktor Orbán date du 25 juillet (rédigée en commun par le FMI et les représentants de l’Union européenne). Une lettre tenue secrète par son destinataire (1). Déjà suspectes pour ceux qui connaissent bien le FMI, les allégations du Premier ministre ont été presque aussitôt (en quelques heures à peine) démenties par la publication du contenu de ladite lettre sur un site réputé pour son sérieux, Index.hu. Une publication qui en reprend tous les détails. Des remarques générales d’ordre macroéconomique et relatives au budget, mais sans exigence vraiment précise, mis à part trois recommandations relatives aux prérogatives de la Cour constitutionnelle, au respect de l’indépendance de la Banque centrale et à l’abandon de l’impôt exceptionnel sur les banques et le secteur des télécommunications.
Le lendemain vendredi 7, le porte-parole de l’UE, Olivier Bailly, puis la responsable de l’antenne FMI de Budapest, Irina Ivachtchenko, déclaraient tour à tour avoir relevé de nombreuses „inexactitudes” dans la liste publiée par le Magyar Nemzet (à laquelle se référait Orbán). Bref, une précaution diplomatique pour dénoncer ni plus ni moins qu’un mensonge.
Le but de l’opération pour Viktor Orbán ? Mettre sur le dos du FMI des mesures d’austérité drastiques auxquelles le gouvernement sera contraint de recourir pour faire face à un trou abyssal de 600 milliards HUF dans le budget 2013 ? Ou tout bonnement rendre le FMI responsable d’un échec (programmé) des négociations ? Difficile à dire, tant la situation est confuse. Les déclarations du Premier ministre se contredisant jour après jour. Mercredi 5 septembre : «un accord sera conclu cet automne» ; jeudi 6: «pas d’accord ! » ; vendredi 7: «nous allons soumettre une contre-proposition pour l’aboutissement d’un accord ». Bref, qui vivra verra. (2)
La presse achète sans broncher
Le problème : reprise par l’édition numérique du journal Le Monde dans l’après-midi du 6 septembre, une dépêche de l’AFP rapportait bien les propos de Viktor Orbán et se référait bien à la liste publiée le 6 au matin dans Magyar Nemzet, mais ne précisait pas qu’il s’agissait d’une liste inventée de toutes pièces, bref, d’une opération de bluff. Pour cause, mise sur le net à 16h40, la dépêche a précédé de peu le moment où allait tomber la révélation sur le site d’Index.hu. Pas de chance. sauf qu’ensuite, aucun démenti n’a été fourni par les médias français. Et sauf que tous les observateurs doutaient déjà fortement de la véracité de cette liste et restaient sur leurs réserves…
Dans le même ordre d’idées, toujours reprise dans Le Monde.fr (mais aussi dans d’autres médias), une dépêche de l’AFP relatant l’affaire de l’extradition du criminel azéri Safarov affirmait que celui-ci avait aussitôt été grâcié «en dépit des assurances données par Bakou à Budapest». Version effectivement avancée par les représentants du gouvernement hongrois. Demi-vérité, qui vaut demi-mensonge… Tout le monde le savait, sauf que la presse française, quand elle a bien voulu traiter le sujet, a préféré jouer la carte de la naïveté(3).
(1): deux constats: alors qu’il était sur place, Viktor Orbán a choisi de faire sa déclaration par video interposée, s’évitant ainsi les questions de la presse. Et pourquoi avoir attendu un mois et demi (de fin juillet à mi-septembre) pour réagir ?
(2): les négociations traînent depuis maintenant 10 mois (novembre 2011), ce qui laisse planer le doute quant à la réelle intention de la partie hongroise (faire durer le jeu pour rassurer les marchés ?).
(3): une presse française plutôt discrète, à la différence de la presse anglo-saxone. Quant à la carte de la naïveté, on croit maintenant savoir qu’elle avait été délibérément choisie face à la version intérêts financiers (source MKI, Institut des Relations étrangères)
broullier pour gouverner…mentir pour se proteger….M.Orban a tout de meme concu un nouveau style politique : le du byzantino-sovietisme (a’ l`occasion facho)….
Monsieur Valine.
Vous semblez être un fervent partisan de la politique soit disant humaniste de FMI et de sacré saint système bancaire, qui, en parfaite connivence, ont fait sombré la moitié du monde dans un impasse parsemé de désolation. La supercherie qui nous a assommée est pourtant inégalable. Mais dans mon âme et conscience, je ne peux pas adhérer à cette forme de création artistique, même si elle est hautement démonstrative.
Orbàn, il n’y a pas longtemps encore, a stupéfait le monde, célèbre de son hypocrisie ambiante, de son langage directe et peu sophistiqué. Et qu’est-ce qu’on entend aujourd’hui ? On lui fait de procès d’attention d’avoir adopté ce même type d’attitude, même si son vocabulaire manque un peu de turpitude.On a impression que cette mentalité permissive est exclusivement réservée aux certaines honorables escrocs de la finance internationale et leurs portes paroles.
Cela prouve que les véritables criminels trouvent toujours des avocats, et que les victimes très rarement.
Chapeau bas ! Vous qui êtes un homme visiblement intelligent, vous devriez garder un peu de distance avec ces honorables institutions et votre esprit critique devrait briller pas des analyses plus objectives à l’égard de la fantomatique vérité.
Merci tout de même pour votre travail continuel au sein de Hu – Lala. Je le suis avec attention, mais, malgré tout le respect que je vous dois, je suis forcé de faire ce remarque.
Respectueusement votre.
Louis
@Louis
Ce que je viens de répondre a un ami:
Tu m’écris que le FMI est une institution chargée de défendre les intérets de la classe capitaliste, etc………. Alors, voyons !
La principale mesure responsable du trou du budget est ce passage a un taux unique d »‘imposition de 16% sur le revenu. Accompagné d’une suppression des dégrevements fiscaux sur le salaire minimum. Cout annuel: 500 milliards, cadeau fait aux couches les plus aisées. Actuellement, 60% des ménages, de la tanche la plus faible (touchant en dessous de 210 000 forints/mois), ont vu ainsi leur revenu net diminuer, 20% inchangé et 20% (tranche supérieure) tres sensiblement augmenté. Résultat: consommation en chute libre.
Ce que souhaite encourager le FMI, c’est précisément de mettre fin a cet état de fait, de remonter la fiscalité des revenu supérieurs et d’abaisser celles des ménages a revenus faibles Et du meme coup relancer la consommation (partant la croissance, aujourd’hui récession).
Le FMI propose un financement de banques? Pas du tout,voila une déformation de la vérité. Il s’agit en fait de mettre fin a cet endettementdes ménages sur emprunts en francs suisses dont on ne sortira jamai. On sait que le gvt Orban avait déja pris une mesure pour favorier un remboursement des ménages a taux artificiellement bas, subventionné. Sauf que la condition était: remboursement dans les deux mois du solde, ce qui avait limité la mesure aux ménages disposant de la trésorerie nécessaire, c »est a
dire, les ménages aisé qui n’avaient emprunté que par spéculation(profiter d’un taux de 6% contre 12% sur le forint). En ont profité:env. 150 000 ménages sur le million endetté. Reste donc encore 800 000
ménages empétrés avec cette dette. Pour en finir avec cette situationparticulierement malsaine et dangeresue (200 000 ménages en impayé de factures), il s’agit de subventionner (sur le pret FMI) le
remboursement de leur emprunt par ces ménages. Or, bien évidemment, le fonds alloués transitera forcément par le banques! Comment faire autrement?
Etc…
Pour parler du FMI voici l’exemple Islandais http://blogs.mediapart.fr/blog/kafur-goldenberg/270812/le-fmi-felicite-l-islande-pour-son-bras-d-honneur-aux-banquiers mais chaque pays et différent
@Louis
Je vous ai répondu un peu vite (j’étais justement en train d’écouter l’allocution d’Orban au Palement !!).
Donc un merci au passage pour votre probité et votre coutoisie que j’apprécie hautement, croyez-moi!
Ceci dit, je n’ai pas l’impression que vous vivez en Hongrie? Ou du moins que vous y suivez constamment en « direct » l’actualité. Si oui, alors contredisez-moi et pardonnez -moi!
Je n’ai rien a priori contre V.Orban. Mais force est de constater qu’il s’enferme de plus en plus dans une obstination maladive qui conduit le pays a la ruine (indépendamment des états d’ame que l’on peut avoir vis-a-vis de Bruxelles et du FMI).
Il passe son temps a nous « bourre le moult » (orthographe?).
Pas plus tard que cet apres-midi devant les députés: « la seule raions pour lquelle nous sommes contraints de faire appel au FMI est la crise européenne, seule coupable. car sans elle, notre pays va au mieux. »
Tu parles! Alors pouqruoi les Polonais, Tcheques, Slovenes et Slovaques, eux, n’ont-ils pas besoin du FMI? La Hongrie est le seul pays de la zone – ex PECO – en récession (avec une inflation qui, maintenant, s’envole largement aiu-dessus des 6%..): croissance de 4% pour les Polonais et les Slovaques, de 5% pour les Lettons.
Non! Soyons sérieux! L’économie hongroise va au plus mal suite a une politiqe (si je peux l’appeler ainsi, car improvisée) suicidaire. Mais Orban se refuse de le reconnaitre. Il semble préférer son ego (avec son protégé Matolcsy) aux intérets du pays…
@Jérôme,
L’exemple est édifiant, mais il est vrai aussi que chaque pays vit une situation différente.
J’ai bien peur que sans l’appui du FMI et s’il ne va pas chercher l’argent ailleurs (en Asie, serait-ce même en Iran), le gouvernement hongrois d’ici la fin de l’année ne pourra plus payer tous ses fonctionnaires.
Ou, il devra les payer moins et moins que pas beaucoup, c’est pas grand chose!
Et puis les amis fortunés de Viktor qui doivent payer le lourd tribu de 16% de leurs revenus (alors qu’en France les non-amis de François qui gagnent beaucoup vont peut-être être taxés à 75 %).
Non, c’est vraiment trop injuste, Orbán est oppressé par le FMI et la seule solution est que son peuple se sacrifie pour lui afin de laver l’honneur de la nation!
M. Waline, Je vous réponde un peu tard, mais je n’ai pas eu l’occasion de suivre vos commentaires qui sont riches en renseignements de la situation en Hongrie. En effet, je ne vis pas en Hongrie, mais je suis d’origine hongroise. Le régime communiste dans les années 60 m’avait forcé de quitter mon pays natal, si non, c’était la prison ou le goulag.
En France j’ai trouvé refuge, et je suis infiniment reconnaissant à ce pays qui est devenu désormais le mien. J’ai toujours était un homme de justice et le monde d’aujourd’hui me désenchante. J’ai longuement rêvé d’une Europe de fraternité et de réconciliation. Malheureusement, la haine, le mépris et la cupidité sont plus forts que la recherche de la cohabitation et la volonté de vivre ensemble en paix et en harmonie. Vous avez entièrement raison quand vous parlez de ce système fiscale absurde et contre productif. De toute façon la Hongrie a entamée sa descente aux enfer à partir de 1992. Tous les gouvernements ont pris leur part de gâteaux, en oubliant au passage qu’une nation ne peut se prospérer qu’en unissant les efforts et en préservant quelques vertus indispensables. C’est un petit pays, entouré des nations pour qui nous sommes considérés comme l’épine de Judas. Les plaies de Trianon sont loin d’être guéries. En France aussi, quand les médias parlent de la Hongrie, c’est toujours pour dire du mal, mais jamais des choses positives. J’ai souvent impression que les intellectuels hongrois ne sont pas conscient du mal qu’ils provoquent quand ils suralimentent cette antipathie déjà récurrente. Leurs querelles intempestives relèguent au second plan le véritable intérêt de leur nation, c’est comme si elle était une terre maudite qu’on doit mettre en péril.
Pour moi la pire chose dans les échanges, c’est d’être borné. Je pense que chaque opinion peut cacher une part de vérité. Il faut les mettre en relation avec d’autres éléments. C’est la le seul moyen d’y voir clair. Je vous souhaite bonne continuation et je vous salue chaleureusement.
Louis