Viktor Orbán (mal) vu par Le Monde

Dans son édition de mardi, le plus grand des quotidiens français, Le Monde, s’est « payé »le premier ministre hongrois Viktor Orbán, dénonçant ses « curieuses manières », en édito qui plus est !

« M. Orbán affiche ouvertement une insultante désinvolture à l’adresse de ses créanciers. » Ainsi débute l’éditorial qui argumente que, plutôt que recevoir les émissaires du FMI à Budapest, Viktor Orbán a préféré s’envoler vers l’Afrique du Sud pour assister à plusieurs matches de la Coupe du monde. Une attitude jugée d’autant plus « désinvolte » par Le Monde que la Hongrie ne participait pas plus à ce Mondial qu’aux précédents et que, surtout, c’est le Fidesz elle-même qui a fait des pieds et des mains pour pouvoir renégocier les termes du prêt accordé par le FMI et l’Union européenne à la Hongrie. A la décharge du premier ministre, avouons qu’entre la Coupe du monde et la réception de sinistres fonctionnaires du FMI, un fan de foot comme l’est Orbán n’avait guère le choix…

Beaucoup plus grave, la dérive autocratique du régime hongrois et plus précisément « la volonté chez M. Orbán d’imposer au pays « l’Etat Fidesz » », qui se traduit, dénonce le quotidien français, par la mise en place des lieutenants du premier ministre à tous les postes clés de l’administration. « Dans toutes les administrations, le parti fait la chasse aux hauts fonctionnaires de l’ancien régime », peut-on lire. Et Le Monde de rappeler que le gouvernement impose que soit affiché dans les bâtiments publics une « Déclaration sur l’entente nationale », éditée par le Fidesz. Le Monde estime aussi qu’en plus de sa volonté de faire voter une « loi de contrôle des médias publics », « le premier ministre dispose d’une presse privée qui lui est acquise ».

Autre grief, la position plus que ambigu qu’entretient Viktor Orbán vis-à-vis de l’extrême-droite : « Au nom de la lutte contre l’extrême droite, ce chrétien conservateur flatte sans vergogne le nationalisme hongrois. » Le Monde a semble-t-il enfin prit la mesure du personnage et ne le qualifie plus, selon l’expression très édulcorée reprise par l’ensemble de la presse française,  de « leader du centre-droit ».

L’édito se termine par ces remarques cinglantes : « Tout cela est-il acceptable de la part d’un pays qui assurera en janvier la présidence de l’Union ? Il faut rappeler à M. Orban que la Hongrie est membre d’un club qui a ses exigences » ! Si l’homme fort de la Hongrie n’a eu, jusque alors, que faire de son image internationale, obnubilé par ses adversaires à sa gauche et à sa droite, il y a fort à parier cependant, que la prise de présidence de l’Union européenne va lui offrir l’occasion de se forger une image plus en conformité avec « les exigences » du prétendu club européen, en assouplissant sa position, tant sur les questions économiques que sur la rhétorique nationaliste qui l’a porté triomphalement au pouvoir.

Lire l’éditorial du Monde : En Hongrie, les curieuses manières de M. Orban

Corentin Léotard

Rédacteur en chef du Courrier d'Europe centrale

Journaliste, correspondant basé à Budapest pour plusieurs journaux francophones (La Libre Belgique, Ouest France, Mediapart).

4 Comments
  1. Le washington post a lui aussi fait un éditorial le 19 juillet a son sujet: http://www.washingtonpost.com/wp-dyn/content/article/2010/07/18/AR2010071802529.html

    Ces 2 journaux sont représentatifs d’une certaine sphère et émanent de 2 pays « occidentaux » dont la présence dans le secteur bancaire hongrois est importante.
    Je trouve assez mystificateur le fait qu’ils démontent Orban a ce surtout apres avoir cet élément de réponse: http://www.pauljorion.com/blog/?p=13982

  2. A mon humble avis, c’est l’incapacité des précédents politiciens, qui l’a porté au pouvoir.

    Il n’y a plus qu’à espérer qu’il saura montrer la voie démocratique à la Hongrie, et ne pas sombrer dans des délires.

    La Présidence Européenne sera peut être le coup de pouce décisif. Il serait dommage de ne pas la prendre au sérieux et objectivement, pour faire avancer les solutions démocratiques…pour toute l’Europe. Et, surtout pour ceux de l’Est, tout de même bien abandonnés à leur triste sort.

  3. La question qui me trotte depuis la reelection de Viktor Orban, c’est sa reelection meme, le fait que apres avoir ete remercie par les Hongrois en 2002, il a malgre tout refuse de laisser la main a une autre personne au Fidesz (mais la question est veut-il reellement que d’autres personnalites emergent). Dans la plupart des autres democraties ou bien meme au sein de l’opposition hongroise on assiste a un renouvellement qui est plutot sain, pourquoi pas du cote du Fidesz ou Orban Viktor semble ne pas vouloir laisser la main…

  4. La question que beaucoup de Hongrois qui ont votes pour Orban devraient se poser c’est qui a paye son voyage pour l’Afrique du Sud, et si c’est bien lui, n’est-il pas choquant qu’il se rende en Afrique du Sud pour le plaisir quand des questions economiques cles pour le pays sont en train d’etre traites…ceci montre beaucoup de desinvolture et quelques similitudes avec le Bling-Bling a la Sarko.
    Entre les declaration de la Fidesz sur la situation economique du pays, en pleine crise grecque et l’arrogance de facade de Orban par rapport au FMI, ca commence bien.
    Je comprend qu’il veuille flatter son electorat, mais a trop jouer avec le feu….Tout pays a besoin d’emprunter de l’argent aux investisseurs (les USA a la Chine…) mais Orban Viktor pense que la Hongrie est au dessus de tout ca et n’a pas besoin d’investisseurs, je pense que les agences de notations vont vite le rammener a la raison.

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