Hongrie : une consultation nationale contre le « plan Soros »

Le gouvernement de Viktor Orbán continue de s’opposer aux quotas de demandeurs d’asile établis par la Commission européenne, qu’il désigne comme « le plan Soros ». Une nouvelle « consultation nationale » a été annoncée en fin de semaine dernière.

Article publié le 18 juillet 2016 dans La Libre Belgique.
Des jeunes sympathisants pro-Orbán devant le musée national le 15 mars 2017 lors d’une des fêtes nationales hongroises. © Yohan Poncet/Hulala.

Débouté par la Cour européenne de Justice qui a validé, le 6 septembre, le mécanisme européen de répartition des demandeurs d’asile, le gouvernement hongrois a tergiversé quelques jours avant de reprendre ses esprits…puis de contre-attaquer. Le leader du groupe Fidesz au parlement, Lajos Kósa, a annoncé vendredi la tenue d’une « consultation nationale », dans le but de savoir « si les citoyens Hongrois soutiennent le plan Soros ».

Tel que détaillé par Lajos Kósa, ce supposé plan de l’homme d’affaires et philanthrope hongro-américain prévoirait l’admission d’un million de migrants dans l’Union européenne chaque année pour les répartir entre les Etats membres et le démantèlement de la clôture à la frontière méridionale du pays. S’appuyant sur ses positions tenues dans la presse par le passé, les nationalistes au pouvoir à Budapest ont fait de George Soros leur principal bouc-émissaire, allant parfois jusqu’à l’accuser d’user de ses milliards de dollars pour « inonder l’Europe de migrants ».

Le gouvernement hongrois estime que les quotas actuels – selon lesquels la Hongrie doit ouvrir ses portes à 1 294 demandeurs d’asile – ne sont qu’un premier pas vers un système de répartition imposé aux Etats membres de façon permanente. Quant à la décision de la Cour européenne de Justice, elle indiquerait que « la mise en place du plan Soros a débuté », comme l’a explicité devant la presse un membre du cabinet du Premier ministre, Csaba Dömötör.

« Il n’y a pas de conspiration »

« Les défis actuels liés aux migrations n’ont rien à voir avec George Soros. […] Il n’y a pas de conspiration mondiale contre la Hongrie », a rétorqué Goran Buldioski, directeur de la fondation de l’homme d’affaires à Budapest, l’Open Society Initiatives for Europe. Pourtant, même si les affiches gouvernementales dénigrant George Soros ont été retirées au mois de juillet dans tout le pays, au terme de plusieurs semaines de polémique, l’homme d’affaires reste au centre des préoccupations du gouvernement.

Ce n’est pas la première fois que les Hongrois seront consultés sur la politique migratoire de leur gouvernement. Au mois d’octobre 2016, un référendum boycotté par l’opposition avait été invalidé faute de participation suffisante (44%). Le Fidesz n’a pas encore dévoilé les détails de sa nouvelle consultation, mais il est probable qu’elle ressemblera aux précédentes sur « l’Immigration et le terrorisme » et « Arrêtons Bruxelles ! » qui avaient consisté en l’envoi de questionnaires, soutenu par des campagnes de publicité massives.

« Plutôt que de continuer avec ses théories de la conspiration et la fabrication de la peur, le Fidesz devrait enfin faire face aux problèmes réels de la Hongrie »

Les partis de gauche sont montés au créneau. « Plutôt que de continuer avec ses théories de la conspiration et la fabrication de la peur, le Fidesz devrait enfin faire face aux problèmes réels de la Hongrie », a réagi le candidat socialiste aux élections en avril 2018, Lászlo Botka. « Pour la coalition au pouvoir, la campagne électorale à venir ne va consister en rien d’autre qu’agiter le nom de Soros », a constaté pour sa part Bence Tordai, le porte-parole du petit parti Dialogue. Tout cela, selon lui, aux dépens de « l’augmentation de la pauvreté et du désespoir, d’un système de santé pourrissant et d’un système éducatif qui a été ramené au 19ème siècle ». Le ton des élections d’avril 2018 est donné.

Hulala, chien de garde de George Soros ?

Corentin Léotard

Rédacteur en chef du Courrier d'Europe centrale

Journaliste, correspondant basé à Budapest pour plusieurs journaux francophones (La Libre Belgique, Ouest France, Mediapart).