La droite hongroise craint la rue et les « libéraux extrémistes »

Les éditoriaux du quotidien Magyar Idők sont toujours un bon outil pour sonder l’état d’esprit dans lequel se trouve la droite hongroise qui gouverne. Ici, le militant Márton Gyulás et les étudiants qui ont manifesté au printemps à Budapest sont traités de « libéraux de gauche extrémistes » à la solde de George Soros et accusés à demi-mots de préparer un coup d’Etat.

Article d’Ottó Gajdics publié le 2 juin 2017 dans Magyar Idők. Traduit du hongrois par Paul Maddens.

Nous ne savons pas ce que Márton Gyulás veut en réalité, mais nous savons qu’il le veut pour de bon. Il y a peu, ce faiseur de « bazar » a divulgué le plan des réseaux internationaux du genre « Soros » et de ses acolytes hongrois, plan qui s’étale devant nous dans toute sa splendeur.

Il a en effet déclaré que si le gouvernement ne met pas d’eau dans son vin, ils cesseront leur coopération avec le pouvoir et Viktor Orbán devra se préparer à des blocus, des occupations de bâtiments et des chaînes humaines. Bien sûr, l’anarchiste génial a déjà trouver un nom : « l’automne chaud« , sous le signe de la non-violence.

Essayons de comprendre ce sur quoi nous pouvons compter en entendant ces déclarations. Ces libéraux de gauche extrémistes qui se tiennent derrière ces manifestations de rue d’ampleur variable mais qui irritent toujours plus le camp « national » ont compris que ces défilés accompagnés de danses et de musique, que ces fêtes destinées à faire tomber le régime, que ces manifestations pour faire tomber Orbán, n’ont pas apporté le résultat attendu.

L’envie de changer de gouvernement ne s’est pas emparée de la société, la manifestation contre la modification de la loi sur l’enseignement supérieur qui a réuni 60 000 personnes a représenté le climax, en attisant l’insatisfaction ils n’ont pas enflammé les braises révolutionnaires qui sommeille – pensent-ils – dans les couches profondes de la société.

Les partis de gouvernement dominent largement dans les récents sondages et l’actuel chef du gouvernement a toutes les chances de continuer à gouverner. [1]Allusion aux élections nationales qui auront lieu en 2018. Chez ceux qui ont la phobie d’Orbán, la situation n’est donc pas rose.

Selon le « livre des songes » des analystes politiques, dans ce cas, habituellement ils placent la barre plus haut. Quand Gyulás menace, cela ne signifie rien d’autre qu’il annonce sans scrupules la phase suivante du chambardement.

On frémit d’horreur à la pensée de ce que peut signifier dans la bouche rebelle de quelqu’un qui a été condamné en première instance à des travaux d’intérêt général pour vandalisme qu’il va mettre un terme à sa coopération avec le pouvoir.

Pour la bande de casseurs au siège du Fidesz et les gens soi-disant en colère « manœuvrant » dans le giron des policiers dans le bâtiment du Parlement, ce n’était donc qu’une répétition générale. Cela présage un sombre avenir. Et ces menaces de blocus, qui évoquent le très mauvais souvenir du « blocus des taxis » d’autrefois, ne sont pas fait pour rassurer les gens de bon sens. [2]Le « blocus des taxis » s’est déroulé peu après le changement de régime : en octobre 1990, suite à une augmentation très forte des prix de l’essence, les taxis ont bloqué la circulation à Budapest pendant 3 jours. La force du mouvement a marqué les esprits.

Car il se peut que quelques milliers d’abrutis irresponsables, sexy et « dans le vent », chantent au milieu de la place Oktogon, bloquant la circulation et empêchant des gens exaspérés de rentrer chez eux. Il n’y a pas de raison que Gyulás et ceux qui sont à sa remorque et qui veulent tout mettre à terre aient le droit de placer leurs intérêts au-dessus de l’intérêt général de ceux qui veulent construire le pays.

Nous avons déjà eu un aperçu de cette « non-violence », sous la forme d’allusions répétées comme « passer par les armes  » ou  » pendre à la lanterne « , et de jets violents de peinture déjà mentionnés. N’oublions pas non plus la visite éclair d’András Fekete-Győr à la rédaction de Origo qui fut à proprement parler un précédent destiné à attiser l’envie de tout ce dont nous avons parlé chez ceux qui y sont réceptifs. [3]Origo.hu, portail d’actualités en ligne pro-gouvernemental.

Il n’y a donc rien à faire, nous devons nous préparer d’ici l’automne à une campagne de haine encore plus provocante et agressive.

Les élèves de Charles Gati[4]Un historien américain d’origine hongroise réputé proche des Démocrates. qui évoque la guerre civile en tant qu’option réaliste et ceux de Saul Alinsky qui professe un radicalisme agressif ne reculeront devant rien. Pour eux, il y aura argent, destrier et armes aussi, puisque George Soros a justement fait savoir que les actions des jeunes fauteurs de trouble lui donnent beaucoup d’espoir et qu’elles sont dignes d’admiration. Ce texte a valeur d’une franche déclaration de guerre. […]

Mais le spéculateur écrit également qu’il ne suffit pas de faire confiance à l’Etat de Droit, mais qu’il faut défendre ce en quoi nous croyons.

De cela justement, nous faisons le serment et nous commençons, nous aussi, à le mettre en pratique !

Notes

Notes
1 Allusion aux élections nationales qui auront lieu en 2018.
2 Le « blocus des taxis » s’est déroulé peu après le changement de régime : en octobre 1990, suite à une augmentation très forte des prix de l’essence, les taxis ont bloqué la circulation à Budapest pendant 3 jours. La force du mouvement a marqué les esprits.
3 Origo.hu, portail d’actualités en ligne pro-gouvernemental.
4 Un historien américain d’origine hongroise réputé proche des Démocrates.