La gare de Budapest, un camp retranché de réfugiés

Plusieurs milliers de réfugiés campent dans la gare Keleti (de l’Est), à Budapest, faute de pouvoir poursuivre leur route vers l’Allemagne.

La capitale hongroise offre ces jours-ci une cruelle illustration de la crise migratoire qui secoue l’Europe et de l’absence de coordination des politiques européennes d’accueil. Plusieurs milliers de personnes s’y trouvent bloquées et les abords de la gare de l’Est (Keleti) sont devenus un camp de réfugiés où plus d’un millier d’hommes, de femmes et d’enfants en détresse s’entassent dans des conditions indignes, rendues encore plus dégradantes par la chaleur infernale qui touche l’Europe centrale. Dans la zone de transit, exclusivement gérée par des bénévoles et ravitaillée par les dons des Budapestois, des familles désespèrent depuis parfois plus d’une semaine de pouvoir accéder aux trains à destination de l’Allemagne.

« Help us Germany ! »

La tension est de plus en plus forte. Dimanche soir, pour la troisième fois du week-end, des dizaines de personnes ont scandé « Help us Germany ! », laissant éclater leur colère au cours d’un face à face tendu avec les policiers leur barrant l’entrée de la gare. Car Angela Merkel a suscité d’immenses espoirs en affirmant que l’Allemagne recevrait 800 000 demandeurs d’asile cette année, puis que les Syriens ne seraient pas refoulés. A Budapest, tous les exilés du Moyen-Orient en parlent comme d’un eldorado où la population les acceptera les bras grands ouverts et où le travail est abondant. En marge de la manifestation, un jeune afghan qui a perdu ses deux parents trois ans plus tôt et fait la route avec son petit frère et sa petite sœur se montre toutefois plus sceptique : « moi je ne suis pas Syrien et j’ai dû donner mes empreintes à la police en entrant en Hongrie et ça, ce n’est pas bon… ».

Après le mur de la honte, le train de la honte

Lundi matin, la police a finalement ouvert les vannes, laissant des centaines de personnes prendre d’assaut trois trains pour Vienne et Munich, dans le chaos le plus total. Joie de courte durée pour leur passagers stoppés avant la frontière sur ordre du ministère autrichien de l’Intérieur, puis séparés en deux groupes, et ceux ayant déjà été enregistrés en Hongrie débarqués pour être redirigés vers une destination encore non-précisée, comme le rapporte un journaliste du site Index.hu qui se trouvait à bord. Comme un symbole : le train Railjet 64 qui a quitté Budapest-Keleti à 11h20 avec à son bord trois cents personnes exténuées dont des dizaines d’enfants, a été stoppé à Hegyeshalom, la ville frontalière où le rideau de fer a été ouvert en 1989.

C’était la crainte des autorités hongroises : que ce pays de transit de 10 millions d’habitants qui a enregistré déjà quelques 150 000 demandes d’asile depuis le 1er janvier devienne le réceptacle des migrants « recalés » par les pays du Nord et de l’Ouest de l’Europe. A la frontière sud du pays, avec la Serbie, le premier rempart de barbelés achevé samedi n’empêche pas les franchissements illégaux et plusieurs semaines seront nécessaires pour que le dispositif de verrouillage de la frontière soit achevé. Cinquante mille entrées ont été enregistrées sur le seul mois d’août.

Cet afflux de migrants attise une surenchère xénophobe entre le Fidesz au pouvoir et le Jobbik d’extrême-droite. Le parlement doit approuver cette semaine l’envoie de l’armée pour sécuriser la frontière, ainsi qu’une série de mesures drastiques destinées à faire barrage aux migrants. Parmi ces propositions : l’expulsion immédiate ou l’emprisonnement jusqu’à trois ans pour toute personne pénétrant illégalement sur le territoire hongrois et la création à la frontière de points « d’accueil » fermés pour les demandeurs d’asile. Face aux nombreuses critiques, la Hongrie défend sa position inflexible en expliquant que la protection de sa frontière sud est une condition d’existence de l’espace Schengen.

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Corentin Léotard

Rédacteur en chef du Courrier d'Europe centrale

Journaliste, correspondant basé à Budapest pour plusieurs journaux francophones (La Libre Belgique, Ouest France, Mediapart).

1 Comment
  1. Quand nous chanterons le temps des cerises ,le gai rossignol , le merle moqueur seront tous en fête ,
    Les belles auront la folie en tête et les amoureux du soleil au coeur …..
    Szép idő Magyarországon és kánikula , pour les réfugiés c’est le purgatoire avant le paradis allemand qu’ils appellent de leurs voeux et après l’enfer qu’ils ont vécu dans leurs pays et souvent durant leurs migrations .

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