Chostakovitch, Bernstein et Rachmaninov joués par le Budapest Festival Orchestra

Par RÓZSA Mihály

Le célèbre orchestre d’Iván Fischer propose un beau week-end en perspective, en présentant des morceaux rarement joués en Hongrie. Il s’agit d’une pièce inspirée de jazz, d’une autre inspirée d’un dialogue philosophique et d’une troisième issue d’un long séjour en Allemagne. Cette dernière œuvre, la Symphonie no. 2 de Rachmaninov sera également présentée en nocturne vendredi soir.

Les conditions dans lesquelles Dimitri Chostakovitch, en 1934,  a composé un morceau imprégné de jazz (strictement condamné a cette époque dans son pays) montrent le désir d’indépendance artistique du compositeur. En mai 1932, il se marie avec Nina Varzar et achève à la fin de l’année son second opéra, Lady Macbeth du district de Mtsensk. L’idée de l’écriture de cet opéra, basé sur une nouvelle de Nikolaï Leskov, remonte à 1930. L’œuvre est créée en 1934 et remporte un immense succès, avec trois productions et quelque 200 représentations tant à Leningrad qu’à Moscou au cours des deux années qui suivent, en plus de nombreuses exécutions hors de l’URSS. Début 1933, 13 jours à peine après avoir achevé la composition de Lady Macbeth, Chostakovitch débute un cycle de 24 préludes pour piano puis compose son Premier Concerto pour piano. Cette même année, il compose l’opus 37, musique pour la Comédie Humaine d’après l’œuvre d’Honoré de Balzac, pour petit orchestre (1933-1934). L’année suivante, il écrit une sonate pour violoncelle et piano. Ces trois dernières œuvres n’ont stylistiquement rien à voir avec les expérimentations du Nez. Chostakovitch compose aussi son troisième ballet, le Clair ruisseau, qui remportera lors de sa création en 1935, un vif succès. Au cours du premier Congrès de l’Union des écrivains soviétiques, en été 1934, Maxime Gorki présente la doctrine du réalisme socialiste. A cette occasion, presque tous les écrivains prêtent serment de fidélité à Staline et rares sont ceux qui, comme Mikhaïl Boulgakov, Ossip Mandelstam ou Anna Akhmatova, ont le courage de s’y refuser. La fin de l’année 1934 ouvre une des pages les plus sombres de l’histoire russe : l’assassinat de Sergueï Kirov marque le déclenchement d’une terreur d’une ampleur sans précédent, donnant le signal à des persécutions massives et à d’innombrables condamnations. À partir de décembre se produisent sur l’ensemble du territoire soviétique des arrestations en masse et une « grande purge politique », une expérience terrifiante qui devient quotidienne à dater de cet instant. Ces premières années de la Grande Terreur sont paradoxalement heureuses pour Chostakovitch : les représentations de Lady Macbeth du district de Mtsensk continuent de remporter un vif succès, et il poursuit son travail de composition avec ardeur. Voyant dans son entourage d’éminents représentants de la littérature et des beaux-arts multiplier les déclarations opportunistes, Chostakovitch cherche d’abord à préserver son indépendance, et ses déclarations publiques, entre 1932 et 1936, ne contiennent guère de phrases qui puissent passer pour une approbation de l’idéologie agressive du Parti. Les œuvres qu’il compose à cette époque, telles que son Premier Concerto pour piano ou sa Sonate pour violoncelle et piano, ne portent aucune influence de la politique intérieure du pays.
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Le débat consistant à se demander où se situe l’art de Leonard Bernstein ne s’est pas encore épuisé. Ses origines familiales et la multiplicité de ses sources musicales contribuent largement à compliquer la problématique qui, somme toute, n’exige peut être pas de réponse univoque et définitive. On pense au parcours d’un George Gershwin qui admirait et enviait Maurice Ravel, lequel lui conseillait sagement de n’être que lui-même. De fait, Bernstein véhicule pêle-mêle et souvent avec génie ses racines russes, sa connaissance approfondie de la musique européenne, le melting-pot gershwinien, la comédie musicale, les idéaux les plus nobles et certaines trivialités revendiquées un peu à la manière d’un Gustav Mahler, voire d’un Chostakovitch. La Sérénade pour violon soliste, cordes, harpe et percussions (1954), inspirée par le Banquet de Platon, penche davantage pour une atmosphère pastorale dans les premier et quatrième mouvements (Lento : Allegro et Adagio) et privilégie le travail sur le rythme dans le dernier volet, Molto tenuto : Allegro molto vivace.

Liza Ferschtman est une des meilleures violonistes de son pays natal, les Pays-Bas.

La Symphonie nº 2 en mi mineur  op. 27 est la seconde des trois symphonies de Serge Rachmaninov. Composée en 1907 à Dresde, elle est créée à Saint-Petersbourg le 26 janvier 1908 sous la direction du compositeur. Elle reste la plus populaire et la plus jouée des trois.

Concerts de Budapest Festival Orchestra, direction: Iván Fischer
Au programme vendredi 11 janvier à 19.45 et samedi à 15.30 au Müpa (Budapest) :
Chostakovitch: Suite jazz
Bernstein: Sérénade
Rachmaninov: Symphonie no. 2.

Au programme samedi à 22.30 au Millenáris Teátrum (Budapest) :
Rachmaninov: Symphonie no. 2.