En 1992, les Tchèques, fatigués de la surenchère des revendications de Bratislava, ont fini par laisser les Slovaques prendre leur indépendance. 25 ans après, les Espagnols doivent-ils faire de même avec les Catalans ?
« En réaction à la déclaration unilatérale de souveraineté adoptée par le parlement slovaque ainsi qu’aux « feux de souveraineté » allumés aux quatre coins de la Slovaquie, le 17 juillet 1992, le gouvernement de Prague a dépêché des unités spéciales à Bratislava afin de maintenir l’ordre et l’intégrité territoriale du pays. »
La première partie de ma phrase correspond à la réalité historique, dans la seconde j’ai donné libre cours à mon imagination. Comment tout cela se serait terminé si, il y a 25 ans, le pouvoir central de Prague avait montré ses muscles aux instigateurs d’une indépendance slovaque, un peu à la façon dont Madrid gère aujourd’hui l’explosif dossier catalan ?
L’exercice en question n’est pas très difficile ; la Tchécoslovaquie qui, aux termes d’un accord entre les représentations politiques tchèques et slovaques, a fait scission le 1er janvier 1993 aurait éclaté de toute façon, cependant la procédure de divorce aurait été beaucoup plus douloureuse. Pour ce qui des Slovaques qui, par leur tempérament fougueux, se mesurent facilement avec les Catalans, les Tchèques seraient devenus leurs ennemis jurés et bon nombre de ceux qui ne souhaitaient pas ce divorce (au printemps 1992, ils auraient été majoritaires) auraient aussitôt basculé vers le camp de ses partisans.
Or, le premier ministre tchécoslovaque d’époque Jan Stráský n’était pas Mariano Rajoy et les Tchèques ne sont pas les Espagnols ; assis chez eux ou dans un café, ils passent leurs temps libre à ingurgiter de la bière en grande quantité. En 1992, fatigués par la surenchère des revendications slovaques vis-à-vis du pouvoir fédéral, ils ont zébré l’air d’un revers de main et dit : « Alors qu’ils s’en aillent ! » Comme quoi l’abus de la bière devient parfois un facteur décisif dans le maintien de la paix.
Lors du référendum d’autodétermination catalane jugé illégal par les autorités de Madrid, le premier ministre Rajoy n’y est pas allé de main morte. Les images des mamies traînées par les flics hors des bureaux de vote sont presque aussi rares que celles d’une éclipse solaire. Rajoy lui a eu une éclipse de raison et les Catalans s’impatientent de lui en faire payer la note.